Les maladies, ravageurs et auxiliaires au verger – Diversifruits – 18 mai 2022

Le 18 mai dernier a eu lieu, au CRA-W de Gembloux, une journée d’informations autour du verger, et plus particulièrement, autour des maladies, ravageurs et auxiliaires présents au verger. Cette journée était organisée par « Wal4fruit » qui vise au développement de la filière économique du fruit haute-tige.

Le planning de la journée fut le suivant :

  • Présentation brève de Wal4Fruits.
  • Introduction par Marc Lateur sur l’importance du système « pré-verger ».
  • Intervenant #1 : Alain Dirick – Producteur de fruits, consultant pour la Cidrerie Stassen et formateur en viticulture.
  • Intervenant #2 : Alexis Jorion – Attaché scientifique au CRA-W, en charge du projet Interreg ZéroPhyto.

Cette journée technique était dédiée à la santé des vergers. L’objectif était de comprendre comment fonctionne ce système « pré-verger » et comprendre comment le maintenir dans un état stable et résilient aux aléas climatiques.

Cette journée a débuté avec une introduction de Marc Lateur qui nous a réexpliqué les fondements d’un verger haute-tige et de son écosystème. Il a particulièrement insisté sur plusieurs points :

  • La nécessité de partir sur une bonne base. Inutile de démarrer un projet d’arbres fruitiers si plusieurs facteurs ne sont pas réunis. Le choix de l’emplacement, du type de sol qui en découle, et donc, l’adaptation des variétés sont des éléments cruciaux. Il a notamment précisé la nécessité d’implanter des haies champêtres autour (et dans!) cet environnement.
  • Le verger haute-tige doit être absolument pâturé ! C’est un élément indispensable pour garantir un équilibre notamment au niveau des campagnols, ravageurs très féroces dans les vergers.
  • Il a également rappelé l’énorme avancée que représente l’écosystème agroforestier du verger haute-tige par rapport aux vergers en bio intensif. C’est une révolution, même si nous reprenons les bases appliquées par nos anciens.
Marc Lateur - Fruitier haute tige

Le pré-verger reste un modèle créé par l’homme, dans lequel il doit intervenir. L’homme sera toujours un élément clé dans un système de production alimentaire. Il doit soigner les plantes présentes. Mais jusqu’où aller ? Dans les traitements notamment ? C’est le sujet de notre journée !

Marc Lateur a notamment fait une comparaison entre un enfant et un verger, que je trouvais particulièrement intéressante :

Pour pouvoir éduquer un enfant, vous devez lui porter de l’attention. Il faut l’encadrer, pouvoir le suivre et l’accompagner tout au long de sa vie mais aussi, particulièrement les premières années. C’est pareil pour un verger. Il faut observer les arbres. Passer très régulièrement. Prendre le temps. Surtout dans les périodes clés, comme le démarrage de la saison.

« Un geste effectué à temps, en épargne 100 ».

En effet, être au bon endroit au bon moment afin d’agir le plus rapidement possible. De cette manière, il est possible de diminuer le travail à accomplir sur le long terme.

Intervenant #1 : Alain Dirick – Producteur de fruits

Alain Dirick – Producteur de fruits, consultant pour la Cidrerie Stassen et formateur en viticulture

Selon Alain, nous sommes confrontés à 4 types d’agricultures, dans lesquelles les techniques varient en fonction des convictions :

  • L’agriculture conventionnelle (depuis les années 40) : lutte bête et méchante contre les ravageurs. Par exemple : mettre le même produit toutes les 3 semaines afin d’éviter l’apparition d’un parasite.
  • La lutte raisonnée, aussi appelée « lutte intégrée » : cette technique consiste à mettre un produit x ou y uniquement si c’est vraiment utile. Les questions suivantes sont alors posées. Ai-je des auxiliaires qui peuvent intervenir à ma place ? Existe-t-il des produits naturels plutôt que chimiques pour répondre à mes besoins ?
  • L’agriculture biologique : traitement uniquement lorsque c’est nécessaire, mais avec des produits agréés bio = produits naturels.
  • L’agroécologie qui est un mélange de toutes les bonnes pratiques pour éviter d’insérer des intrants, peu importe lesquels. Engrais verts, permaculture … Tous les moyens sont bons pour obtenir plus de diversité, et donc plus de chance d’éviter les parasites. Mais il y a toujours des parasites et des prédateurs… Impossible de les éliminer totalement. Il y a une multitude de “vie” partout. C’est très riche et on doit en profiter.

Les mesures agroenvironnementales

Aujourd’hui, il considère que nous perdons 1 cm de terre par an à cause des techniques agricoles actuelles. Ces dernières sont néfastes et provoquent par exemple de l’érosion pluviale, des vents … 1 cm par an. Autant dire que c’est énorme.

Pour contrer ce phénomène, il est intimement convaincu que les arbres ont un rôle à jouer.

L’arbre est :

  • un purificateur d’air et d’eau.
  • un apport financier grâce à la production de bois d’oeuvre ou de bois de chauffage.
  • le meilleur puit de carbone qui puisse exister. L’arbre est un véritable créateur de matière organique :
    • 40% des racines meurent chaque année, ce qui crée de l’humus dans le sol. Les feuilles créent aussi de l’humus lorsqu’elles tombent à l’automne. Mycélium qui va vivre dans le sol dans les racines.
    • Grâce aux racines et au mycélium vivants dans le sol, les arbres vont aller chercher du sel et des minéraux dans le sol sur des dizaines de mètres. Les racines amènent des éléments minéraux dans les feuilles, qui vont à leur tour nourrir le sol.
  • un outil de régulation des écarts extrêmes de températures.
  • très esthétique. L’arbre a une fonction paysagère. Il joue un rôle esthétique majeur dans une région. Il rend le paysage plus agréable, ce qui nous aide à avoir un meilleur moral. Il attire des touristes et donc apporte des rentrées d’argent.
  • très attractif en termes de pluie: plus il y a des arbres, plus il y a de pluie. L’évapotranspiration apporte de l’humidité relative au-dessus, ce qui provoque une humidité proche de 100% et donc la pluie.

L’orateur a attiré notre attention sur le rôle que peut jouer un arbre en cas de sécheresse agricole. Il a notamment longuement décrit une idée reçue :

« Un arbre ne consomme pas de l’eau, il en produit. Par évapotranspiration, il transpire et apporte de l’eau au sol. ». Pour cela, il suffit de comparer l’état actuel des sols en culture et en lisière de forêts.

Mettre une rangée d’arbres tout les 24m en culture a donc tout son sens. Certes, cela diminue le chiffre d’affaires au premier abord, mais augmente le bénéfice grâce à l’augmentation de rendement global.

D’une manière générale, il conseille de ne jamais mettre un verger dans un fond à cause des gelées printanières. Toutefois, ces endroits présentent un avantage : ils peuvent accueillir des mesures agro-environnementales.

Les auxiliaires au verger

Et si on modifiait l’environnement et les pratiques existantes afin de protéger et de favoriser les auxiliaires ? Ces organismes qui contribuent à contrôler les ravageurs pour nous.

 

Il nous alerte sur la nécessité de re-créer une biodiversité végétale. Elle permet de favoriser les auxiliaires qui sont dépendants de la diversité des ressources en place pour réaliser leur cycle biologique.

Le saviez-vous ? La bourdaine est le seul arbuste sur lequel le citron (papillon) pond et sur lequel ses larves peuvent se nourrir.

Pour mettre en place toute cette biodiversité, nous avons longuement parlé des haies agricoles et de leur composition.

Alain nous a recommandé l’outil « Auxil’haie » qui permet de connaître les essences intéressantes à planter en fonction d’un auxiliaire de culture recherché. Très intéressant ! L’outil nous permet de composer des séquences ligneuses attractives pour des invertébrés auxiliaires spécifiques.

Nous menons une guerre contre la nature. Si nous la gagnons, nous avons perdu.

 

Voici une liste non exhaustive des auxiliaires intéressants pour les arbres fruitiers :

  • Typhlodromes
  • Coccinelles
  • Syrphes (super ami de l’arboriculteur) – une seule paire d’ailes. Sa larve est un grand prédateur de puceron. Autant que la coccinelle. Petite larve gluante. 80 pucerons par jour quand la larve est au plus grand.
  • Chrysopes. Coupe le puceron. Plusieurs dizaines par jour. Difficile de voir les adultes. Les larves sont comme des cheveux. Vraiment typique. On les voit autour du 20 mai.
  • Punaises : prédatrice du psylle du poirier. Symbole de la lutte intégrée en poirier.
  • Punaises anthocoride pour le psylle.
  • Punaises mirides
  • Cantharides
  • Perce oreille
  • Cryptolaemus (prédateur de la cochenille rouge, qui tue l’arbre.)
  • Etourneau/rossignolBergeronette grise/Gobemouche —> Mettre plusieurs types de nichoirs pour différents oiseaux. Jusqu’à 30 nichoirs par hectare de vergers matures.
  • Carabe
  • Hérisson
  • Cloporte
  • Epeire
  • Staphylin
reconnaitre les parasites du verger

La reconnaissance des parasites

Plusieurs parasites sont fréquents au verger. Afin de pouvoir agir, il faut pouvoir les détecter et les reconnaître formellement. En voici une liste non-exhaustive :

  • Gui (c’est un hémiparasite) – Idéalement couper la branche qui a le gui. Pousse souvent dans des endroits humides.
  • Campagnols des champs et campagnols terrestres.
  • Cheimatobie (marche en arpenteuse).
  • Tordeur, arpenteuse et noctuelle : 3 types de chenilles qui attaquent les fruitiers
  • Bupreste (demi lune comme entrée, curter si présence du bupreste pour l’éliminer).
  • Zuzère du poirier, la chenille peut rester jusqu’à 2 ans dans l’arbre. Trou a pied de l’arbre avec des excréments. Check fin juin pour vérifier. On passe un fil de fer pour la piéger.
  • Carpocapse : vol entre le 10 et 20 mai.
  • Hoplocampe (trou dans la pomme jusqu’au 5 juin).

Intervenant #2 : Alexis Jorion – Porteur du projet “ZéroPhyto”

Alexis Jorion – Attaché scientifique au CRA-W, en charge du projet Interreg ZéroPhyto

Le second orateur, Alexis Jorion, est attaché scientifique au CRA-W de Gembloux. En charge du projet « zéro phyto » mené par le CRA-W, il nous a fait part d’une partie de ses conclusions.

Son objectif ?

Identifier, valider et transmettre des clés qui permettent de produire des fruits et des légumes sans aucune pulvérisation de produits phytosanitaires:

  • Levier agronomique (biodiversité, association de cultures, de plantes, techniques culturales)
  • Approfondissement de principaux ravageurs
  • Méthode de protection & technique (filets, piégeages)
Fruits sans traitement

Pour en savoir plus, je vous invite à consulter leur chaîne Youtube qui décrit le projet !

Les ravageurs du verger haute-tige sur lesquels ils ont travaillés :

  • Carpocapse du pommier
  • Anthonome du pommier et du poirier
  • Hoplocampe du pommier

Suivez le guide !

Ravageur #1 – Carpocaspse du pommier

Il s’agit d’un papillon crépusculaire bien connu, dont le vol a lieu en début de nuit. Le carpocapse aime les nuits relativement chaudes où la température excède les 11 degrés. Ce papillon n’est pas très grand, environ 20 mm. Sa chenille varie entre 2 mm à 2 cm lors de son développement.

Symptômes – Comment identifier le carpocapse du pommier ?

  • Fruit dévoré de l’intérieur
  • Trou de sortie avec une déjection sur le trou

Cycle de vie du carpocapse du pommier

  • En moyenne 2 générations par an (par chez nous, 3 cycles dans le sud de la France).
  • Les larves passent l’hiver dans un cocon dans les écorces des arbres.
  • Début mai, émergence en adulte.
  • Ponte d’un oeuf sur une feuille ou sur le fruit.
  • Rentre dans le fruit, se nourrit et ressort en juillet (1) et en septembre (2) pour s’abriter pour l’hiver.

Comment lutter contre ce ravageur ?

  • Confusion sexuelle.
  • Cartons ondulés sur le tronc (fin juin et fin septembre) : les éliminer en les donnant aux poules. On les enlève mi-juillet et mi-octobre. Les placer à 20-30 cm du sol et une juste au niveau du point de greffe. (voir la vidéo sur la chaine YouTube pour expliquer comment la faire)
  • Éliminer les jeunes fruits en juin qui sont infecté.
  • Pâturage.

Note : Il existe aussi un Carpocapse du prunier ! Celui-ci a des dégâts identiques, mais les larves sont beaucoup plus petites. La lutte est identique, à l’aide d’un piégeage avec le carton ondulé.

Cartons ondulés - carpocapse

Ravageur #2 – Anthonome du pommier et du poirier

Il s’agit d’un coléoptère bien connu, issu d’une famille caractérisée par le nez allongé. Ce petit charançon de 5 à 6 mm de long à rostre allongée a pour objectif de détruire les boutons floraux, et donc, vos futurs fruits !

Dégats anthonome du pommier

Symptômes – Comment identifier l’anthonome du pommier ?

  • La larve s’attaque aux fleurs. Les pétales se referment et la larve s’emballe dedans.
  • La larve se développe et se transforme en adultes.

Si floraison importante ; c’est cool, éclaircissage naturel

Si faible floraison : destructeur car forte infestation et peu de fruits.

Cycle biologique et de reproduction de l’anthonome

  • Émerge au mois de mars
  • Dès que les bourgeons s’ouvrent, les bêtes vont pondre dedans.
  • En juin, rentre déjà en hibernation, cachée dans des abris.

Comment lutter pour réduire les populations d’anthonomes du pommier ?

  • Frappage fin février, début mars. Pour voir si on a une grosse population ou non
  • Traitement (Pyrèthre, Spinosad) – Attention, forte toxicité sur d’autres espèces
  • Pâturage (poules et moutons)
  • Favoriser la présence des mésanges : l’alimentation des mésanges bleues est composée à plus de 50% d’anthonomes !!!

Note : ce ravageur est aussi présent sur le poirier. Si les dégâts sont similaires, les moyens de lutter également.

Ravageur #3 – Hoplocampe du pommier

C’est un hyménoptère de 6-8 mm de long. On peut le reconnaître à son corps noir sur le dos et de l’orange sur la face ventrale. Sa tête est également orange.

Dégâts – Quels sont les dégâts occasionnés par l’Hoplocampe du pommier ?

  • Attaque primaire : cicatrice superficielle.
  • Attaque secondaire : fruits perforés et évidés.

Cycle de vie – Comment se reproduit cet hyménoptère ?

  • Apparition à la mi-avril.
  • Étalement de vol pendant toute la période de floraison.
  • Ponte dans les fleurs.
  • Développement à la base du fruit, puis rentre à l’intérieur.
  • Quitte le fruit et hiverne dans le sol.

Comment lutter contre l’Hoplocampe du pommier ?

  • Surveillance avec piège blanc type “Rebell”
  • Ramasser les fruits et les détruire.
  • Pâturage (poules, moutons).

Pour le poirier, il est également présent, mais est de plus petite taille. Pourtant, les dégâts qui en découlent sont similaires.

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